blackwidow
Âge |
22 ans.
Cursus |
Le droit, hein ? Un choix pour lequel on s’épuisait, peut-être en vain. La vérité, peut-être aurait-il fallu la voir en face : il n’était pas fait pour ça, le garçon. Non, et pourtant, le voilà, perdu au milieu des rangs obéissants, égaré entre ces enveloppes qui, pour les splendeurs d’un prestige qui les affame, ont délaissé leur humanité, tentant tant bien que mal de soutenir un rythme qu’il avait du mal à supporter. C’est qu’il n’était pas si mauvais que ça, au fond. Comment se serait-il glissé jusqu’ici, sinon ? Un niveau satisfaisant, loin des premiers cependant, c’est que fondu dans une masse de médiocrité, il avait toujours réussi à s’en sortir. Mais à quel prix ? Lui, ce qui brûlait dans son cœur, celui dont on aurait pu dénoncer l’infâme fragilité, c’étaient les mirages d’un tout autre avenir. Une existence bercée dans des douceurs idylliques, lui, c’était pour l’art, qu’il aurait voulu dédier sa vie. Oui, lui, c’était dans l’ardeur d’une passion prohibée qu’il aurait voulu s’enivrer. Seulement, voilà, s’imaginant se lancer dans une carrière de juge d’instruction, ou même de juge aux affaires familiales, c’était dans le droit, qu’il s’était inconsciemment jeté. Un milieu qui le détruisait, plus qu’il ne l’épanouissait, mais la vérité s’écroulait : c’était bien trop tard pour reculer.
Nationalité |
Ah, les splendeurs du Kazakhstan, un pays qu’on ne s’était jamais imaginé quitter. Les vastes étendues de verdure, bordées par les gardiens de ces contrées, ces imposantes montagnes étalant sur ces terres encore sauvages, leurs grandeurs, on se revoyait encore les admirer. Une région à la beauté insoupçonnée, et son âme, c’était à ces déserts vertigineux, à ces hauteurs décorées par l’éclat d’une nature verdoyante, ainsi qu’à la modernité dissonante glissée dans un pittoresque immense qu’elle appartenait. Même s’il était issu de la minorité coréenne, origine qu’il tenait de ses ancêtres qu’une terrible Histoire avait menés sur ces terres, une diaspora qu’on ne savait oublier, lui, comme ses parents, c’était bien ici qu’ils étaient nés.
Caractère |
Iseul, la douceur d’une âme vulnérable, la sérénité d’un coeur qui, dans sa fragilité, aura été dénoncé comme misérable. Un garçon que la compassion a dévoré, un corps qu’une Humanité aura un peu trop aimé. Ils se sont évanouis, les rires, et les années, dans leur vice, ont amoché un esprit que les tendresses de la simplicité auraient dû continuer d’embrasser. Oh, Iseul, quand l’avais-tu perdu, ton magnifique sourire ? Cette innocence, celle qui enjolivait une gaieté pourtant innée chez toi, oui, Iseul qu’on avait joliment nommé après les délicatesses de la rosée, dis-moi, quand avais-tu commencé à sombrer dans les noirceurs d’une terrible mélancolie ?
Depuis qu’on l'avait éloigné de ce pourquoi il brûlait. Depuis que les merveilles de l’art, celles pour lesquelles la nature humaine, il le croyait, était vouée, on les lui avait brutalement prohibées. Abandonné dans les rages d’un travail que l’on sentait dépourvu de sens, c’est là que l’on avait senti la chaleur d’une âme, qui se laisse bercer dans les beautés de la poésie, doucement s’évader. Écroulé sous les vestiges d’un rêve, ces ruines qui laissaient dans leur débris, un sordide goût de tragédie, dans cet esprit qu’on voyait se noyer, c’était l’infamie du vide qui s’étalait. Iseul, c’était évident, il se perdait. Était-ce vraiment ça, celle que l’on nommait sublimement, la vie ? Regardez ce qu’ils en faisaient, de ce trésor qui aurait dû rimer avec paradis. L’hideur qui tâche la joie, le désespoir qui dévore les mirages du bonheur… Et Iseul, dans les affres de son malheur, ce sont les terreurs de l’accablement qu’il aura seulement trouvé.
Gâcher sa vie dans le futile, s’épuiser dans l’inutile, abandonner les langueurs d’un songe qu’on aurait aimé toucher, mais “le dessin ne te mènera nulle part”, et la passion alors, sombre dans l’oubli.
Une âme que l’on prive des sérénités de l’art, forcée à s’égarer dans les bassesses d’un monde dans lequel elle ne se retrouvait pas, non, se perdre ainsi, ça n’était pas ça la vie.
Iseul Min
Ici, il n’avait rien pour être heureux. Ici, il dépérissait, lentement, dans la rage du feu. Les flammes de l'infâme, elles dévoraient un esprit qui s’accable dans une fatigue insoutenable. Cette âme, sombrant dans ses morosités, on l’aurait trouvée méprisable. Mais, Iseul, il était de ces coeurs passionnés qui ne savent exister que dans l’ardeur de ce qui les exaltaient. Et le sien, l’Art, il n’y avait que ça qu’il aimait. Dessin, peinture et poésie, voilà les seules grâces pour lesquelles il brûlait de vivre. Douce fragilité, dans les langueurs des émotions, on s’évade, une fièvre qui trouble la raison, et avec cette affliction, on s’élance dans de longues embrassades.
On voulait s’enivrer des joies de ce dans quoi on est fait pour exceller, mais ces rêves, on avait été tristement prohibés de les poursuivre. Pourtant, ce gamin, c’était un indéniable talent qui restait piégé en lui. Le virtuose fait valser les couleurs, le chaos immacule la blancheur, et dans la frénésie, la beauté se dessine avec splendeur. C’était aux charmes du pittoresque que son âme était destinée. Il le croyait, Iseul, que son avenir, c’était dans les danses de la création qu’il était tracé. Une ligne noircie, comme celles qui décorent ces carnets qui accompagnent chacun de ses voyages, pourtant, ça n’étaient pas ces sentiers-là que l’on avait choisis. Comme c’était dommage, que l’on aurait pu entendre dire, et même lui, il l’aurait chuchoté : ça n’était pas ainsi qu’il l'avait vue, sa vie.
Ces études, lentement, elles le consumaient. Ici, il y avait tout pour le faire sombrer dans une folie que rythmeraient tragiquement les tourments d’un affligeant désespoir. Peut-être avait-il honte de le penser, mais tout ça, c’était la faute de ses parents. Eux qui n’avaient souhaité que sa gloire, soucieux de la réussite d’un fils qui s’égarait dans les langueurs de ses futiles passions, ils avaient toujours cherché à ce qu’il côtoient les meilleurs établissements… Quitte à devoir dépenser des sommes qu’ils n’avaient pourtant pas. Quitte à devoir quitter ce pays que lui, aimait tant. Au fond, tout avait commencé lorsqu’ils avaient déménagé pour la Corée. Une brillante idée que jamais ils n’auraient dû avoir. Sous l’excuse de sa réussite scolaire, c’était son bonheur que l’on avait sacrifié. Iseul, il n’était pas fait pour se forcer à faire ce qu’il n’aimait pas. Il le sentait, que, mentalement, ça ne fonctionnait pas. Et dans le supérieur, ce mal-être s’était évidemment accentué. La cadence l’épuise, et lui, il n’était pas fait pour tout ça. Pourtant, c’était ainsi que les choses devaient fonctionner. Une atroce réalité qui le faisait se sentir presque misérable. Il n’était pas fondamentalement mauvais, le garçon. Situé dans une moyenne acceptable, seulement, il n’avait rien de prodigieux. Une éternelle médiocrité, c’est qu’au fond, il avait toujours été dans le milieu. Et peut-être que le pire, il était là. On savait se frayer une place parmi les meilleurs, mais de ceux-là, on n’en avait jamais fait partie. Condamné à flotter dans une normalité visiblement assez satisfaisante pour qu’on lui donne une chance, il n’était pas assez intelligent pour atteindre les hauts du classement. C’est que, dans les domaines qui n’avaient pas su l’intéresser, il n’excellait pas. Oh, il aurait beau y mettre toutes ses meilleures volontés, le résultat, jamais il ne serait à la hauteur des efforts péniblement fournis. Ça avait toujours été comme ça. Et il le savait, ça ne changerait pas.
Le temps avance, dans sa terrible cadence, c’est sa mélodie qu’on essaie de suivre. Sur ce chemin dont on sait qu’il n’est pas le bon, on s’effondre dans cette douleur qui nous enivre. Un souffle, et l’esprit se morfond, non, ce monde, il n’était pas fait pour lui.
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Et alors, la question s’évade, dans ce malheur, pourquoi continuait-on de s’enfoncer ?
Parce qu’il était trop tard pour reculer. Parce qu’Iseul, il se sentait piégé. Une peur de décevoir, la crainte de devoir tout recommencer… Lui qui avait réussi jusqu’ici, il ne pouvait tout de même pas tout arrêter. Non, il ne pouvait pas, et pourtant, la vérité, elle éclatait : plus le temps s’écoulait, plus le poids de sa pitoyable tragédie s’écroulait sur lui. Une infamie qui le condamnait à abandonner ce pourquoi il était fait, un drame qui l’emprisonnait dans les flots de tout ce qu’il détestait. Ces études. Ces cours. Et évidemment, cet environnement. Âme solitaire, elle qui s’enferme dans sa réserve, les dortoirs, ils étaient l’apogée de sa torture. Parce que le garçon, il avait besoin de solitude. Une danse avec cette douce amie, parce qu'il n’y avait que comme ça qu’il savait se retrouver. Personnalité introvertie, oh, plus que tout au monde, ces moments de quiétude, c’était une véritable nécessité pour lui.
Pourtant, Iseul, il n’haïssait pas fondamentalement l’autre. Loin de là, sûrement, car dans ses amitiés, c’était l’intensité de la sincérité qu’il avait toujours cherché. Une valse dans la profondeur de l’âme, une compassion magnifiée, ce qu’il adulait, lui, c’était l’authenticité. Oui, il aimait aider, il aimait se laisser aller dans l’indulgence de sa réconfortante compréhension. Un coeur bercé dans la pureté, ou une misérable candeur qu’on aurait pu dénoncer. Une sensibilité méprisable, que l’on s’était pourtant oser à aimer. Parce que, pour le garçon, cette empathie qu’on aurait pu détester, il en était persuadé, c’était le joyau de l'humanité.
L’aube pousse les noirceurs avec lesquelles valsent les songes. Un paysage qui se teinte dans l’ocre, ces lueurs qu’accompagnent un astre en plein éveil, elles caressent des pensées qui rongent. La beauté qui s’étale, on aurait aimé la piéger. Dans les mots, sur la toile, peu importe, dans la blancheur, on aurait aimé la figer. À la place seulement, il faudrait se défaire des réconfortantes literies, pour s’abandonner dans les souvenirs d’une détresse qui dévore l’esprit. Une existence haïe, mais Iseul, toi qui es arrivé jusqu’ici… Regarde, tout ça, c’est bientôt fini.
Douce rosée, dans la fraîcheur de l’aurore, une parfaite harmonie, décore les pétales de quelques fleurs,
Fragile, ces gouttes, ce sont les éclats d’une sérénité qu’elles piègent en elles, et dans le calme du matin, invitent doucement à l’éveil.
L’or frôle la main, l’âme est belle, ces perles humides, leur douceur caresse la chair, radieuse innocence déposée par le ciel ; Et à l’image de ces joyaux, Iseul, il portait dans son coeur cette paix que la nuit, embrassant le jour, impose sur ces terres.
Cristaux d’eau, un cadeau du divin, brisés par l’indélicatesse, leur limpidité pourtant c’était la vie qu’elle gardait ; et toi, doux gamin, comme ces trésors célestes, affable, et un peu vulnérable, c’étaient les fragments de cette terrible sensibilité que tu portais.
Dans l’Art, on trouve sa raison d’exister,
Garçon désorienté, une âme rare édifiée dans la fragilité ;
Mais il ne fallait pas changer, car cette douce vulnérabilité,
C’est bien elle qui fait ta beauté.